L’Abbé Pierre – Une Vie de Combats, +++++

•Sortie France le : 8 novembre 2023
•Synopsis et bande-annonce : labbepierreuneviedecombats (via SND/YouTube)
•Chronique :

 

Le chemin fut long Il fut compliqué aussi Malheureusement, bien que cela soit peut-être aujourd’hui un peu moins pire qu’avant, il en reste encore du chemin à faire …

Benjamin Lavernhe met l’Abbé Pierre à l’honneur, l’Abbé Pierre fait briller Benjamin Lavernhe qui nous offre une magistrale prestation avec un jeu impeccable dans son incarnation. L’Abbé Pierre – Une Vie de Combats, émotion et des tristes constats au programme d’un biopic qui remet certaines choses à leur juste place.

« Vous serez plus utile ailleurs. »
Montre le parcours d’un homme qui « fuyait le monde » mais qui avait une sincère volonté d’apporter des choses aux autres et faisait peut-être des rêves très prémonitoires, Henri Grouès a bien été plus utile ailleurs et à bien d’autres, bien plus qu’il ne l’aurait probablement été dans la paroisse où il se voyait finir.
Moine, soldat, passeur, résistant, doit vivre avec les sacrifices de toutes sortes qu’exige ou qu’impose la guerre, député, L’Abbé Pierre – Une Vie de Combats qui fait un portrait tout en retenue‎ d’un grand monsieur, présente ‎un homme qui ne s’aimait pas trop, n’avait pas une haute opinion de lui-même, s’est longtemps cherché, s’est trouvé, a trouvé sa voix, sa mission, a appliqué un dessein qui est celui qui lui était destiné (- seul LE responsable de tout ça pourra confirmer mon propos -), et surtout « ne faisait jamais rien comme les autres. »

« J’ai essayé ! »
Oui, il a tout donné avant ses « grandes vacances. »
Montre un homme qui était en colère contre les Bosch, présente à nouveau la cruauté nazie, raconte une époque durant laquelle il fallait aussi résister à sa colère intérieure, nous conte l’après-guerre, relate le combat d’un ancien résistant face aux autorités et aux politiques de l’époque de son pays qui étaient dans leur petit confort de l’Assemblée Nationale, oui, le film relate que cela était un énième rude combat pour lui, un combat avec des batailles très éreintantes et éprouvantes.
À ce stade, j’étais étonné de trouver que cette masse de faits qui ne représente qu’un tiers du film, paraisse si peu, tant l’ensemble est présenté ‎avec une gestion de maître, car le traitement de chaque sujet, présenté de façon concise, va à l’essentiel.
Quand arrive ce dont on a le plus entendu parler : Sa guerre contre la misère, et durant celle-ci, ses croisades pour les démuni.e.s, son combat contre son corps malade et celui pour l’honneur d’une grande femme qui l’a accompagné et soutenu jusqu’au bout,‎ ce portrait d’homme à la fois biopic et film historique, nous permet de découvrir un homme pragmatique, un homme de combats, il ‎évoque l’engagement‎, il nous permet surtout de (re)découvrir celui qui savait convaincre par les mots.
Et je reviens sur la présentation d’un important élément du biopic qui est le portrait d’une femme, celle qui l’a accompagné, Lucie Coutaz, ‎incarnée par Emmanuelle Bercot qui par son interprétation, rend un grand hommage à cette femme d’honneur. Il est très beau !

Tout ce qui précède est une chose. Quand viennent les récits durs et poignants, il est difficile de ne pas trouver ‎triste ou plutôt de se dire qu’on retrouve en 2023 des situations que beaucoup pensaient derrière eux, des situations que leurs enfants et petits-enfants ne devaient pas connaître : le mal logement, le manque de moyen et de dons alimentaires des associations, des politiciens toujours à la rue masse sur ces items.

La genèse d’Emmaüs par – en partie – celui qui considère qu’il n’en n’a pas fait assez, un homme meurtri par des « égoïstes qui gâchent tout, » en fait, les personnes qui connaissent Emmaüs et l’Abbé Pierre par l’intermédiaire de la presse, qui ont entendu parler des batailles de l’homme, comme celles et ceux qui ne savent rien de ses actions, L’Abbé Pierre – Une Vie de Combats, tout est fait de sorte que tout le monde sache ou se remémore qui fut ce grand homme et le sacré duo de constructeurs qu’il a composé avec Lucie Coutaz.

Montage, rythme, contenu, tout dans ce film est bien géré pour éviter de la longueur, pour être passionnant, être instructif avec des périodes de référence comme l’hiver 1954 et son grand discours de l’appel à la solidarité. Tout est surtout bien fait pour que le récit ne soit pas larmoyant – enfin, pas trop – ou susciter de l’apitoiement.

Pour conclure, L’Abbé Pierre – Une Vie de Combats, des constats :
1. Il y a eu deux grands appels. Celui du Général Charles de Gaulle et son appel de Londres du 18 juin 1940, celui de l’Abbé Pierre en hiver 1954. D’autres ont tenté d’imiter, sans succès (il y a eu un avec son très grave : « Nous sommes en guerre. » La posture est une chose, l’incarnation tout autre).
2. Les gens sont prêts à se battre dès lors qu’ils ont une raison de vivre.
3. Tant de questions qui sont restées sans réponses.‎
4. 1954-2004-bientôt 2024. Les années finissant en 4 semblent être des marqueurs de temps de moments sociaux compliqués, un signe ? 1914, cela vous parle ? À surveiller.‎ Bonne toile !

 

 

« On trouve des choses bien dans les poubelles des riches »

« Jean-Marie Le Pen, je lui ai dit deux fois ta gueule et je lui redirais à chaque fois…// Des hommes comme lui, il y en aura toujours, c’est contre l’indifférence qu’il faut se battre »

« Partager et aimer »

« La fraternité ne connaît pas de repos »

« Nous faisons tous partis de la même Humanité »

« Je vais continuer à me battre contre le mauvais jugement, le mépris et l’indifférence »

 

 

  •  p.s :  « Travail-famille-patrie. Les valeurs de notre France chrétienne »
    Je n’en suis absolument pas nostalgique, mais je tenais à faire ce relevé, car il est curieux de se dire qu’en 2023, on en est apparemment pas rendu de cette période, que nous sommes même peut-être en train d’y revenir au nationalisme.‎ Avec le constat que Ridley Scott, à travers son film Napoléon faisait un triste portrait très réaliste de l’attitude des français et ce qui se passe dans ce biopic, une réflexion me vient : Les cinéastes seraient-ils et elles les Nostradamus d’aujourd’hui ?

 

 


@cineprochereviews