Tout simplement noir, +++++ ♥

•Sortie France le : 8 juillet 2020 __ Vu le : 8 juillet 2020
•Synopsis et bande-annonce : toutsimplementnoir (via Gaumont/YouTube)

Chronique :

 

Pas du tout politiquement correct — Ne dégouline pas le « Black live matters* » — Des barres, mais de rires …

Comédie tout public, bien plus intelligente mais surtout moins gratuite et opportuniste que la très populaire Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu, Tout Simplement noir avec son pléthorique casting est joueur, est un film fait par un équilibriste hors pair qui se joue de tout sans que cela suinte la facilité. « Jean-Pascal Zadi » bravo…et je mesure le propos !

Les questions sont posées : Est-il bête ou intelligent ? Activiste ou opportuniste ?
Comme piste pour un début de réponse, juste l’intro fait le job, car tout semble être là. En effet, d’entrée, on ne sait pas comment le prendre ce film dont son personnage principal, son comique de situation qui provoque des sourires et rires en permanence ainsi que‎ ses dénonciations et sa forme qui tous font très vite dire : « Que du bon ! » , oui mais…!
Effectivement, oui mais…! Les caricatures, les comparaisons, les raccourcis sont là pour évoquer des choses ainsi que des faits plutôt clivants, et l’humour second degré qui est aussi de la partie de cette comédie décalée aux scènes parfois burlesques y participe grandement aux dites évocations.
Donc oui, son casting, son rythme, son montage, la durée des ses très nombreuses scènes qui sont souvent des exemples, des revendications, des dénonciations et des vérités bien sérieuses mais dont la forme fait second degré, sont traîté.e.s avec une efficace justesse. L’instant du casting où des clichés sont dénoncés, ce que l’on attend d’un acteur noir fait rire, mais jaune ! L’ensemble du contenu de Tout Simplement Noir vous parlera !

Petites mises en bouche par des exemples avant de poursuivre :
« Tu fais des films de bounty ! »
Hé oui, ça dézingue, ça s’invective sec et pour autant, malgré la gravité de certains propos, on arrive toujours à prendre du recul et on parvient à analyser, voire à décortiquer l’instant.
‎-« Quand se réunissent des noirs pour faire quelque chose, c’est tout de suite communautaire. Alors que les homos et d’autres non ! » (- Remarque valable pour les arabes ainsi que pour un rassemblement féministe dédié aux exclusivement aux femmes noires cf. la polémique engendrée par l’organisation d’un festival afro-féministe européen réservé aux femmes noires. -). À travers le recueil du propos ci-dessus, vous avez là une vérité parmi trop tant d’autres.
-Très fort !  « Qu’est-ce qu’un noir pour toi !? » La scène de cette question est…whouaw…excellente. J’ai trouvé que l’écriture, encore une fois, était  juste.
-Mais plus fort encore : -précision du casteur : « Ton personnage est Abdoulaye, un noir, dealer violeur et islamiste » /‎-remarque de la femme de l’acteur noir casté : « Pas une kaïra, ni un bledard pour cette fois …pour ce casting. »
« Je vous demande des noirs vous me ramenez des blacks. Je cherche quelqu’un, j’ai besoin d’un nègre, un noir africain, tu es un noir de Paris. » Le cynisme du personnage de Kassovitz durant cette scène, un délice, quelle justesse, même si là, on sent que la caricature est poussée !

Il a une date le Jean-Pascal Zadi : le 27 avril maiiiiiis….voilà quoi !
Tout Simplement Noir, vous invite à suivre‎ les « aventures » de cet homme légèrement Gaston Lagaffe dans sa quête comme un périple où la bonne volonté est mise à mal. Vous apprécierez ou pas cette ‎histoire d’homme et de conviction qui finalement est très touchante, mais encore une fois, tout sera question de ressenti.
Propos parfois nuancés voire ambigus, comme lors de la scène qui réunit noir, arabe et juif‎ durant laquelle comme pour tout le film on rit et on se désole. Pas un instant de répit, pas de temps mort. Malgré la dominance de l’humour second degré, Tout Simplement Noir est fort intructif, cela de sa première à sa dernière minute.

Un grand constat s’effectue avec ce film : « Les noirs sont divisés ! » Aïe !
En gros, ils ne peuvent pas se blairer, les désaccords entre-eux, ceux qui ne connaissent pas leur histoire‎ mais qui se revendiquent de ceci ou de cela, ceux qui ne se sentent pas français, les idéologies, l’esclavage et les divergences d’opinions, oui, les noirs sont divisés, et !?
‎Comme il l’évoque si bien, en fait la « communauté noire est pluriculturelle » , très…segmentée, très diversifiée etcera…comme toutes les communautés en gros !
Sur un ton pas vraiment satirique, le film n’exclut personne, montre à quel point certains sinon beaucoup finalement ne connaissent pas leur histoire, vivent sur leur vérité toute faite, excluent ceux qu’ils désignent comme pas vraiment noir, s’excluent car pas envie d’être vraiment noir ou de se limiter à cette vérité parfois encombrante historiquement et culturellement parlant.
Donc en effet, Tout Simplement Noir est implacable sur ce point qui est le fait qu’il n’y a tout simplement pas de communauté noire parce que cela n’est pas culturel, d’où parfois l’absence de solidarité. Il démontre qu’il existe des noir.e.s qui vivent leur vie comme ils le peuvent, avec les chances « qui leurs sont octroyées » , que le chacun dans son coin est probablement la résultante d’un stygmate certes lointain mais pas du tout oublié, qu’ils aimeraient parfois que ceux avec qui ils vivent leur foutent la paix et les regardent comme des êtres de race humaine à part entière, pas comme le noir de tel ou tel région avec tous les clichés trop bien affiliés.

Très très gros concentré de beaucoup de choses intéressantes : propos, remarques, faits, critiques,… interpelle plus qu’il ne heurte et pourrait rejeter, Tout Simplement Noir est tout simplement pour toutes et tous, il est bien instructif par moments pour ne pas dire tout du long.
Parfois caricatural oui, mais toujours très juste et cela sur tous les sujets abordés. En fait, il est bien fichu ce film L’intelligence dans sa mise en forme, l’ensemble de son contenu, ainsi que ses actrices et acteurs me font employer ce qualificatif familier.
Certain.e.s comme moi n’auront pas attendu ce film pour revendiquer le fait qu’ils et elles ne sont pas « Black » mais « Noir.e » , même si cela semble être une gêne pour la personne en face qui a le sentiment de proférer une insulte…raciste en le disant… Je l’ai vécu et le vis encore !

« Il y a du fond dedans, je ne suis pas là que pour amuser la galerie. »
Avec ce propos, je crois que l’acteur-scénariste-réalisateur répond à bien des questions sur sa motivation et dissipe des doutes. ‎Bonne séance, ce ne sera que du plaisir !

 

« Pourquoi tu m’enfermes dans la case d’une journaliste noire. Je ne suis pas journaliste noire, je suis journaliste ! »

« Un noir debout c’est un noir qui n’est pas assis »

« On ne va pas changer le monde. Mais si on peut influencer ceux qui vont le faire, alors faisons-le ! »      – Tupac –

 

 

  • p.s 1 :  Le casting. Tous sont très bons, manque quand même Thomas NGijol. Gros coup de cœur pour le rap de Soprano. Fary fidèle à lui-même, mais très légèrement caricatural en Bernard L’Hermitte et son concept « Black McDo » , est Fary. Il est appréciable de voir des guests se mettre dans des états pas vraiment confortables à l’image de Kareen Guiock (journaliste sur M6) ou encore un Lucien Jean-Baptiste déchainé très surprenant,‎ sans oublier Caroline Anglage dans un second rôle qui à tort pourrait être minoré. Pour cette dernière, en effet, son personnage est celle d’une femme en couple mixte qui n’aide pas vraiment son mari, le genre qui tant qu’elle n’a pas été confrontée à de la violence raciste prend beaucoup de situations à la légère. Dans ce film, aucun personnage n’est de trop et encore moins une scène, un propos, un exemple.
  • p.s 2 :  Question. Parmi vous, combien savez que le grand Général de Gaulle avait interdit aux tirailleurs sénégalais (sauf quelques uns) de défiler avec les militaires français lors de la descente des champs-Élysées de 1944 pour fêter la libération !? Vous voyez. On rit, mais on s’instruit…surtout avec l’uchronie au générique de fin.
  • p.s 3 : Question à nouveau que je pose pour élargir le débat : « Y a t-il besoin d’être d’une ou de se sentir membre d’une communauté pour être, pour avoir l’impression d’exister ?
    Un.e noir.e, un.e arabe, une juive‎, un juif, un.e indien.ne, un.e asiatique, des personnes avec des histoires culturelles fortes, un aspect ou encore un signe d’appartenance sont-elles forcément condamné.e.s à devoir se justifier d’être ou de ne pas d’être d’une communauté parce nées donc ont hérité d’un gène et d’une culture…que certaines rejètent parfois ?
    Bref ! Et si désormais on se considérait d’une unique communauté – supprimant de fait le terme race – qui serait « la Communauté Humaine » composée de différentes cultures, ne serait-ce pas plus simple !? Tout simplement à méditer !

 


 

@cineprochereviews

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