•Sortie France le : 12 octobre 2022 __ Vu le : 14 novembre 2022 •Synopsis et bande-annonce : simone-levoyagedusiecle (via Warner Bros France/YouTube) •Chronique :
Une fresque intimiste, mais aussi un phare dans la nuit — Présentation de la femme de beaucoup de combats par vocation, « La bien nommée l’emmerdeuse » car coriace Simone Veil — Un sacré montage pour conter une sacrée vie …
Douleurs, peines, réussites gloires de Madame Simone Veil, oui le film aurait pu s’intituler de la sorte tant l’ensemble de son contenu semble être complet.
Simone Veil – Le voyage du siècle est un vertigineux biopic à la fois contemplatif et sensible, instructif et pédagogique, il fait un inventaire-bilan et un état des lieux, rend un hommage et lance – je crois ! – un avertissement.
Le film nous présente le un parcours hors du commun, celui d’une irréductible combattante qui était portée par l’injustice sociétale, qui luttait contre elle, avait ses convictions et ne s’en est jamais écartée, ce malgré toutes les épreuves de vie, injures, invectives, barrières de toutes sortes qui s’étaient dressées face à elle.
L’histoire de Simone Veil, sauf si intime de la famille, on la connaît un peu ou pas du tout.
Quoi qu’il en soit, après avoir vu ce biopic, vous connnaitrez les grandes parties de sa vie de femme publique et personnelle. Attention, le film ne se limite pas à une exploration de ces deux grandes parties.
En effet, l’exploration qui est large permet de voir à quel point cette femme a fait bouger des lignes, des progrès dont beaucoup d’entre-nous jouissons aujourd’hui.
Simone Veil – Le voyage du siècle est une fresque historique pour comprendre bien des choses de notre société contemporaine, comprendre les raisons de cette place particulière qu’Elle a dans le cœur de beaucoup de personnes.
Vie un peu rock’n’Roll, ce film est comme un tourbillon et donc sa forme colle avec le vécu ici présenté.
Ça part dans tous les sens ! La présentation n’est pas linéaire, ses différents combats personnels et professionnels, ses témoignages, ses échanges avec sa sœur, mais surtout sa vie de survivante de la Shoah, le récit est passionnant, Simone Veil – Le voyage du siècle c’est presque la France et Ses histoires d’un temps pas si lointain.
Instructif au sens large :
Côté découvertes, ce film, il y en a de nombreuses et de tous types comme une grande personnalité : Louise Vayse, qui dit ceci : « J’ai lutté pour être élue, pas pour être nommée ! »
Il y a ces saisissantes reproductions de la survie dans les camps de concentration, moments durant lesquels nous observons les process de triage à l’arrivée des trains des hommes, femmes et enfants, la façon dont s’effectuait leur marquage. Marquage, car en voyant le procédé, vos références de ce qui s’apparentait comme être un tatouage, qui à la vue de la technique est un marquage façon bétail, vous… non rien ! Ces instants sont toujours très durs à voir !
Même si ce n’est pas la première fois que l’on regarde ce type de récit qui évoque les faits dans les camps de concentration durant la Seconde Guerre Mondiale, cela heurte. Si c’est le cas ou que cela fut aussi le cas pour vous, c’est rassurant, rassurant de se dire que l’on ne s’y fera pas et l’acceptera jamais, qu’il y a encore et espérons-le, qu’il y aura beaucoup de personnes qui feront de sorte que ce genre de crimes ne se reproduisent pas.
Instructif au sens très large :
Côté biographie, il l’est beaucoup sur la personne car le biopic ne se contente pas de mettre en image ce que nous entendons souvent sur Madame Simone Veil.
Une femme qui sûrement est à jamais une grande figure de la vie politique et sociétale française, une femme à qui on doit beaucoup de libertés, de droits, qui jusqu’à la fin est toujours restée droite dans ses bottes, une femme de caractère pas vraiment patiente, une compagne insoumise et complice.
Par contre, en aucun cas elle n’est présentée comme une féministe, ce sont avant tout les batailles de la femme en guerre contre l’injustice que nous voyons.
Instructif au sens plus large :
Le personnage politique. La façon dont elle faisait face aux jeux politiques qu’elle déjouait – la politique, la chasse gardée des hommes même si incompétents – , son côté borné avec lequel il fallait composer, il y a surtout ses combats inconnus ou méconnus comme celui des conditions de vie dans les prisons, tout est dans le film.
Instructif encore et toujours :
Sur le plan intimiste. On nous présente ses combats personnels, ses démons, ses blessures qui n’ont jamais guéri, mais surtout son couple et donc son mari Monsieur Antoine Veil, avec qui elle formait un duo très complice. Le film donne l’impression de lui rendre aussi hommage.
Il y a la présentation du lien avec une de ses sœurs, qui avant comme après la Shoah, était l’être probablement le plus cher avec lequel elle était la plus complice.
Sur le plan de l’Histoire. Il y a la Shoah, instant qui permet la découverte d’une injustice sociale peu évoquée, celle de la place dans la société des déporté.e.s survivant.e.s qui à l’époque étaient ignorées. Honte de la part des autorités et de certains français qui devaient s’y confronter ?
Le film relate cette condition en appuyant sur le fait que des déporté.e.s survivant.e.s ont perçu leur traitement d’après retour de déportation comme une injustice qui les étouffaient à l’intérieur.
Sur le plan sociétal. Le film montre la France d’hier qui n’a pas vraiment disparu aujourd’hui ; Une situation qui est celle de la lutte pour le droit à l’avortement, le droit de faire ce que l’on veut de son corps qui est sans cesse menacé ; Prouve que l’Éducation est la base du bon fonctionnement d’un pays, d’une société ; Sans oublier le fameux : la vie d’un couple avec la place de l’épouse d’un homme exerçant dans le milieu de la politique, la place de la femme en société, celle de l’époque.
Sur le plan politique. Vous serez contenté.e.s par la présentation de combats, mais surtout d’un combat qui est son plus célèbre, du bilan d’une vie dont les pertes, qui malgré l’importance des victoires, vous marqueront peut-être plus.
Le film semble prendre la responsabilité d’être aussi un plaidoyer pro-européen et anti-militariste. Du coup, il fait écho avec le retour de la guerre en Europe depuis le 24 février 2022 : Attaque de l’Ukraine par la Russie.
Devant le film, on passe par de nombreuses sensations et sentiments.
Saisissant comme devant cette longue scène dans le camp d’Auschwitz avec la présentation du long processus de déshumanisation effectué par les allemands nazis, on éprouve de la honte et de la gêne.
Lors de la présentation des virulents échanges à l’Assemblée Nationale sur la loi pour le Droit à l’avortement, de la colère et de la désolation.
C’est curieux à dire, mais il s’agit d’un sincère ressenti : Ce film s’apprécie encore plus juste à l’audio.
Des propos premiers comme secondaires qui souvent sont d’une ultra-violence, sont puissants, mettent mal à l’aise surtout quand on est un homme.
Intéressant à regarder, enrichissant à écouter, l’instant est intimiste, parfois gênant, car il est empreint d’une grande délicatesse et de pudeur.
Un discours de fin clairvoyant qui invite à l’humilité, mais surtout invite à la vigilance et au combat, ce film, c’est 2h20 d’Histoire et de culture.
Simone. Le voyage du siècle, il y a un contenu très riche. Curieusement, l’attractivité du contenu et du montage donnent l’impression qu’il dure que la moitié des 2h20 annoncées. Une performance !
Bonne toile devant non pas un grand film, mais devant une grande œuvre destinée à toutes et tous dont les portraits et instants sont forts, une grande et belle œuvre qui fait preuve de beaucoup de délicatesse côté présentation, une œuvre respectueuse de la belle personne – au sens figuré comme propre – qu’était Madame et la Ministre Simone Veil !
« Je préfère être dans l’inconfort plutôt que le mensonge »
« La France doit se reconstruire. Dans la laïcité et le respect de tous »
« Les livres sont les seuls dépositaires de nos mémoires »
« Les personnages politiques mettent tellement d’énergie à se faire élire qu’une fois élus, ils ne savent plus pourquoi ils se sont fait élire »
« La mémoire ne passe pas par les images, elle passe par la parole »
« L’injustice est la mère de tous les malheurs »